Qu’est-ce qui fait que des humains investissent leurs énergies pour le bien collectif et que d’autres s’enveloppent d’un confortable manteau d’inertie ? Pourquoi détourne-t-on le regard de ceux, petits ou grands, qui pleurent nerveusement (de soulagement) à la vue d’une portion de riz ? Pourquoi ces questions ? C’est qu’au moment d’écrire ces lignes, Gaza est affamée depuis le blocus humanitaire du 2 mars ; la famine est à ses portes.

Et si tout cela se produisait chez nous, qu’en serait-il du niveau de solidarité et de l’aide alimentaire ? Souhaitons que notre immobilisme collectif ne soit pas le reflet de la valeur que l’on accorde aux droits humains de la population gazaouie ou encore de celle du Liban, du Sahel, de l’Afghanistan, de l’Ukraine, pour ne citer que quelques pays en état d’extrême insécurité alimentaire.

Ça fâche, ça révolte, ça indigne… mais ça ne bouge pas ben ben. Les rues ne devraient-elles pourtant pas être noires de monde ?

Pendant ce temps, à Montréal…

À l’autre bout du monde – et de cette réalité – apparaissent puis disparaissent au rythme du va-et-vient des camions à ordures des milliers d’objets et matériaux en tout genre, pour beaucoup réparables, valorisables, réutilisables.

Malgré le sentiment d’impuissance face aux guerres et à leurs conséquences étrangères à notre quotidien, certains trouvent leur pouvoir d’agir dans la lutte contre l’hyperconsumérisme. Et face au gaspillage, nombreux sont ceux qui s’accordent : la société surconsomme, et beaucoup trop ! Ça aussi, ça fâche, ça révolte, ça indigne… mais ça ne bouge pas ben ben. Un comportement attribuable à un « fais ce que je dis, pas ce que je fais » ou à un écrasant sentiment d’impuissance et de désillusion ? Je préférerais la deuxième option.

Certains trouvent néanmoins les moyens de faire aller leurs bottines à la vitesse de leurs babines, comme plusieurs camelots de L’Itinéraire qui récupèrent et qui sont de véritables valoristes, parfois même sans le savoir.

En soutien à leur démarche et à celleux dont le mode de vie rompt avec le capitalisme excessif : le best-seller Ordures ! Journal d’un vidangeur de l’auteur, éboueur et freegan assumé, Simon Paré-Poupart.

Le freeganisme ? c’est l’art de vivre de gratuités, ou presque. C’est aussi la concrétisation du concept politique de décroissance, qui s’inscrit dans une contre-culture radicalement écologique et anticapitaliste en boycottant la société consumériste par la récupération, le recyclage et la création d’un nouveau paradigme social et économique.

S’il encourage les actions freeganes et plus largement écocitoyennes, le succès d’Ordures ! Journal d’un vidangeur soulève tout de même une question : pourquoi un livre qui critique les habitudes de la masse peut-il être applaudi et élevé au rang de best-seller par cette dernière ? Il y a sûrement derrière cette contradiction une envie de changement collectif qui n’a tout simplement pas encore trouvé son moyen d’agir.

Comme l’écrit Jules Couturier dans son excellent dernier article pour L’Itinéraire : « À quand le redressement de ce monde à l’envers ? »

Vous venez de lire un article de l’édition du 1er juin 2025.
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