Alain, qui est administrateur de systèmes informatiques à l’Université de Montréal, achète L’Itinéraire à Hamed depuis trois ans. Le client et son camelot sont venus échanger dans les locaux du groupe communautaire.

Leur rencontre

Hamed : Au début, Alain m’achetait L’Itinéraire dans l’anonymat. Il me donnait souvent 10 $ ou 20 $. Je me disais qu’il devait être sacrément gentil, mais on ne s’était pas présentés et on n’échangeait pas plus que ça.

Alain : Je le trouvais rigolo, il amenait un peu de soleil dans ma vie. Après avoir discuté un peu, on a dîné quelques fois ensemble. On a fait connaissance, on a parlé de nos vies respectives. J’ai apprécié Hamed parce qu’il m’a vraiment soutenu et parce qu’il a été de très bon conseil. Il a comme un sixième sens : il voit à travers les gens. Du premier coup d’œil, il comprend la personne. Souvent j’arrive, il me regarde, j’essaie de lui sourire, mais il voit qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Il n’y a pas beaucoup de gens dans ma vie qui ont réussi à me percer aussi facilement.
La bonne humeur d’Hamed.

Alain : Quand je sors du métro et que je monte l’escalier, je l’entends au loin et je sais qu’il est là. Et déjà, je souris. Il amène le soleil à mes fins de journées stressantes. Il danse, il chante, il slamme, il fait de tout.

Hamed : Avant de sortir de chez moi, j’essaye de me mettre de super bonne humeur, je médite pour me débarrasser des idées négatives, pour mieux me contrôler. Peu importe ce que tu es, le secret pour convaincre les gens, c’est d’essayer de les faire rire. Quand tu arrives à leur faire décrocher un sourire, c’est gagné. Et le lendemain, ils reviennent te voir.

La mission de L’Itinéraire

Alain : Hamed n’a pas eu beaucoup besoin de m’expliquer ce qu’est L’Itinéraire. J’ai des frères religieux, mais j’ai aussi un jeune frère itinérant, avec qui je n’ai malheureusement plus de contacts. Je comprends très bien que des gens puissent se retrouver dans la difficulté, ça me touche beaucoup. Je ne peux pas aider mon frère, ça me pousse à soutenir des personnes comme Hamed.

Hamed : J’explique aux gens que L’Itinéraire est un bon moyen d’éradiquer la pauvreté et d’apporter plus de sécurité. Les itinérants sont des gens qui n’ont pas d’espoir, ils n’ont pas d’autre choix que de faire n’importe quoi, c’est pour ça que certains tombent dans la drogue et deviennent parfois dangereux pour la société. L’Itinéraire permet de sensibiliser le public et d’aider directement des personnes par la vente du magazine.

Le magazine

Alain : Je l’avais déjà acheté par curiosité sans vraiment savoir ce que c’était. Mais c’est quand j’ai rencontré Hamed que j’ai commencé à acheter le magazine de façon régulière. J’aime sa diversité. Ce ne sont jamais les mêmes genres d’histoires. J’aime être surpris par certains témoignages, j’aime aussi les entrevues avec des artistes. C’est intéressant d’avoir leur point de vue sur l’itinérance et les problèmes de société. J’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de très bons articles écrits par les camelots. J’aime aussi les pages plus légères, comme les mots croisés ou la bande dessinée.

Hamed : La vente du magazine nous permet de gagner notre vie, mais il n’y a pas que ça. Moi je le fais plus pour les autres. Je travaille pour les itinérants, pour aider le magazine à diffuser son message, et aussi pour donner le sourire aux clients. On a tous des soucis, on a tous des jours où on est en forme et des jours où on est plus déprimés. Moi, je fais le maximum pour transmettre ma joie de vivre.