L’itinérance n’est pas une invention chrétienne, ni musulmane, ni préhistorique. Elle est la cave dans la maison, le bout d’os sous le charcoal. J’ai vu de belles personnes sombrer jusqu’à se noyer. Bon. Marcher clopin-clopant n’est pas un jeu d’enfant. Il vient de haut en monnaie, gambling, looping sans frein d’arrêt. L’itinérance est une réalité drôlement banalisée, comme les kamikazes, pour Dieu sait quoi. L’itinérance c’est perdre sa famille, c’est soi-même la mettre de côté. L’itinérance c’est oublier d’exister, de se souvenir des beaux moments de l’enfance. Mettre son pied l’un devant l’autre sans savoir si l’autre suivra. Parce que le doute est toujours là, qui ou quoi nous a mis au monde ? Et chaque monde, le mien, sourd, muet, aveugle, va selon ce qu’ils (elles) peuvent. Être itinérant n’est point l’absence de vivre, c’est l’égarement. Subsaharien évitant les oasis, si prêtes à nous dépanner. L’itinérant est un être perdu assez longtemps parce que son SOS s’est perdu dans la tempête.

Juin 2007, Tiré de Sentinelles I, p. 95

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