Jennie Carignan s’enrôle dans les Forces armées canadiennes en 1986, à tout juste 18 ans. Diplômée du Collège militaire royal du Canada en génie des matériaux, elle fait ses premières armes au sein du corps du génie militaire. Au fil des décennies, elle gravit les échelons dans un milieu encore largement masculin. En juillet 2024, elle devient la première femme à accéder au poste de cheffe d’état-major de la Défense, le plus haut grade militaire au pays.

Engagé à 17 ans, Joseph Clermont Mathurin fait ses classes à Saint-Jean-sur-Richelieu en 1979 avant d’être muté à Valcartier, au sein du 2e régiment blindé du Canada. Derrière le volant des chars d’assaut, il découvre la discipline, l’adrénaline mais surtout la dureté du milieu. Trois ans plus tard, alors qu’il devait participer à une mission de maintien de la paix à Chypre, il quitte les Forces armées. Ce départ est une libération. Il lui faudra des années pour se reconstruire, retrouver confiance et surmonter ses traumatismes. Aujourd’hui, il pose un regard ambivalent sur son expérience dans l’armée.

Qu’est-ce qui vous a menée vers l’armée ?

Générale Jennie Carignan: Je pense que c’est un désir d’action. J’avais fait un an au cégep à Sherbrooke, mais je m’ennuyais. Je cherchais d’autres choses. Il n’y avait personne dans ma famille qui était militaire, mais j’ai un ami de la famille qui m’avait invitée à aller voir le spectacle de fin d’année du Collège militaire royal de Saint-Jean. J’y suis allée et ça m’a donné des idées. C’est des études combinées avec des sports, avec l’apprentissage du leadership et le bilinguisme. Pour moi, ça voulait dire une vie plus dans l’action. J’ai décidé de l’essayer et de voir ce qui allait arriver après.

Étiez-vous seule quand vous êtes rentrée dans l’armée ou vous aviez du monde autour?

Générale Jennie Carignan: Non, j’y suis allée toute seule. Mon père était policier, je ne l’avais jamais vu pleurer. Mais quand il est allé me porter à l’autobus ce matin-là pour prendre l’avion, il a versé quelques larmes. Je le voyais à travers la fenêtre quand je suis partie. Ça m’avait affectée un petit peu en partant. Dans mon temps, c’était assez raide, l’entraînement.

Je ne sais pas si ça a changé aujourd’hui?

Générale Jennie Carignan: Je pense que l’entraînement existe pour offrir des défis. C’est certain qu’il faut que ce soit difficile, mais c’est comme quand on participe à un sport, on sait qu’on va travailler fort. C’est la même chose. Au niveau du leadership, on veut s’assurer que ce soit un leadership qui accompagne, qui coache nos gens. On veut que, lorsqu’il y a des erreurs, on puisse recommencer et se dire : « La prochaine fois, je ferai mieux ». On ne s’attend pas à ce que tout soit parfait du premier coup. Les méthodes d’instruction sont importantes, mais c’est clair qu’il faut faire des choses difficiles pour devenir encore meilleur.

Vous venez de lire un article de l’édition du 1er novembre 2025.
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