Je devine déjà vos questionnements après avoir lu cet éditorial anthropologique à cinq cennes. Coudonc, il n’a jamais dit c’est quoi être Québécois ! C’est simple, je ne le sais pas moi-même. Vous, le savez-vous réellement ?

« Moé ch’t’un Canadien québécois ! Un Français canadien-français ! Un Américain du Nord français ! Un francophone, Québécois canadien. Eh… Québécois d’expression canadienne-française-française. On est des Canadiens, Américains francophones d’Amérique du Nord, des franco-québécois. »
Bob « Elvis » Gratton

Né à Montréal, dans l’arrondissement Rosemont, je suis descendant de Claude Desjardins Charbonnier, arrivé en 1665 avec le régiment de Carignan, et de Marguerite Cardillon, Fille du Roy arrivée le 18 juin 1665 à bord du navire Saint-Jean-Baptiste. Tous les deux sont de France. Je ne peux pas être plus pure laine que ça, diriez-vous ? Pas si certain… Trois cent cinquante-trois ans et 2049 descendants plus tard, il y a de bonnes chances que j’aie été influencé par des électrons libres provenant de plusieurs sources. Par exemple, vers les 1753, un peu de sang anglais s’est infiltré et vers 1830, un tsunami d’Irlandais frappe et modifie mon ADN. Comme dit notre célèbre metteur en scène Robert Lepage : « Il n’y a rien de plus impur qu’un Québécois pure laine ».

Aujourd’hui, je demeure dans un quartier de Montréal où l’on pourrait facilement me définir comme un « étrange » dans mon propre paclin*. Toutes les couleurs, les odeurs et les confessions se confondent dans une même pauvreté. Est-ce que ma confiance identitaire est affectée ? Pantoute.

Collectivement on devrait s’accepter et s’exporter. Chaque fois que je rencontre une personne qui vient d’immigrer au Québec, c’est le même paradoxe qui est unanimement évoqué : Vous êtes la nation la plus ouverte ; vous avez des congés de paternité ; les LGBTQQIP2SAA manifestent ostensiblement leur identité et ont le droit de se marier, de changer de sexe, et plus. You can wake up to French croissants and Italian espresso, have beer at an English pub, eat Indian food while listening to Simple Plan.

– En français s.v.p. – Sorry ! Je me suis égaré, j’avais une graine de sésame de mon bagel au smoked meat de coincé.

Ah oui, j’y suis ! Selon le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion du Québec, les valeurs communes de la société québécoise sont les suivantes : parler français, une nécessité (OMG, Bonjour, Hi ! Facebook, Twitter, Snapchat, Netflix et tout le reste). Le crémage du français en arrache un peu.

Ensuite, nous voulons une société libre et démocratique, riche de sa diversité reposant sur la primauté des droits, dont les pouvoirs politiques et religieux sont séparés et dans laquelle les femmes et les hommes ont les mêmes droits. Ouais, c’est comme les blagues à cinq cennes des gommes balloune Bazooka, j’ai toujours eu de la difficulté à les comprendre. Il y a ici beaucoup de matière à se gargariser son gorgoton sur plusieurs pages. À vous d’y réfléchir.

N’oubliez pas d’ajouter les obstacles physiques, moraux, psychologiques et administratifs qui nous empêchent parfois de bien comprendre nos valeurs, comme l’inclusion et l’équité. C’est quoi vivre dans une société tolérante ?

Tirons drette là, d’un coup sec, sur le gros plaster. Droite, gauche, fédéraliste, séparatiste, créditiste, nationaliste, solidaire, libéral, conservateur. Arrêtez ! La marmite est pleine. Après le hockey vient la politique. Le Québécois aime bien se déchirer de l’intérieur.

Un heureux mélange

Ensuite il y a notre identité culturelle, avec nos mocassins, nos raquettes, notre ceinture fléchée, nos sets carrés ou sets callés, notre sirop d’érable, notre cidre de glace. C’est comme dire que je suis un peu Autochtone, Français, Anglais, Américain. Mais j’aime bien aussi mes egg rolls, mon couscous, mes crevettes de Matane en écoutant du Gilles Vigneault tout en savourant du Gaston Miron, du Dany Laferrière et du Kim Thuy.

Et là, rapidement, je regarde le cœur de votre humble magazine de rue. Saviez-vous que c’est 16 employés qui accompagnent les camelots, façonnent le magazine ? En plus des 30 bénévoles. Ce sont tous des Québécois avec des saveurs française, marocaine, colombienne, brésilienne, métis, guyanaise, libyenne, haïtienne et beaucoup plus. Quel beau mélange qui se partage un vaste territoire de 1 542 056 km2.

Nous passons notre temps à analyser et à décortiquer. Apprenons à mieux nous écouter, à nous connaître et à nous apprivoiser.

Notre Québec est beau. Je suis heureux d’être Québécois, point !

* Paclin, autre prononciation de patelin ou encore de pasquelin, selon Le nouveau dictionnaire complet du jargon de l’argot. Arthur Halbert 2014. Signifie « endroit quelconque, ville ou village ».