Si les coûts trop élevés sont le principal frein à la poursuite d’études postsecondaires : 32 % des jeunes ont décroché en raison de ce facteur non négligeable. Les préoccupations financières habitent les songes de 68 % des jeunes Québécois âgés de 18 à 24 ans, de même que pour 78 % des parents interrogés dans cette étude du Baromètre Universitas en collaboration avec la firme de sondage CROP.

« Les coûts sont le principal frein à l’accessibilité des études supérieures. Effectivement, on doit s’inquiéter, car on voit par les chiffres qu’un étudiant sur trois ne va pas aux études supérieures parce que les coûts sont très élevés », s’inquiète Simon Telles, président de L’Union étudiante du Québec (UEQ), la nouvelle association nationale qui, depuis deux ans, a remplacé la défunte Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ). « Défenseure des étudiants les plus démunis », l’union représente huit associations et compte 77 000 membres.

Jobines à outrance

« Il y en a qui travaillent en combinant deux ou trois emplois à temps partiel et ils travaillent presque à temps plein. Ça nuit à leurs études, par le manque de sommeil, ils ont moins de temps pour étudier, donc cela entraîne de moins bons résultats académiques. Ça crée aussi des problèmes psychologiques chez les étudiants en raison de l’accumulation de beaucoup de stress et d’anxiété. Certains font même du dumpster diving (fouille de poubelles) et ils fréquentent des ressources communautaires autour de l’université, comme des foires alimentaires ou des organismes qui fournissent des vêtements et de la nourriture à prix abordable », poursuit-il.

Le Programme d’aide financière aux études (AFE) propose des bourses en fonction des revenus de l’étudiant, de ceux des parents, du niveau de scolarité, des enfants à charge et des déficiences fonctionnelles. « Dans la pire des circonstances, il peut s’agir d’une bourse de 20 000 $ par année attribuée pour le cas d’une mère monoparentale avec une déficience fonctionnelle, à faible revenu. Dans un cas inverse où l’étudiant habite chez ses parents et travaille pendant les études et qui a des parents ayant un revenu important et l’aidant financièrement, il n’aura sûrement pas de bourses car il gagne trop d’argent. Ainsi, pour certaines personnes, c’est inaccessible de profiter de l’aide financière; c’est toujours les même qui échappent au système ! Une des problématiques : les étudiants dans le besoin vont travailler encore plus et, à cause de ça, ils vont se faire couper leurs bourses !, déplore-t-il.

Laissés pour compte

Si l’importance de poursuivre des études postsecondaires fait consensus chez 94 % des jeunes et 97% de leurs parents, c’est le cas également pour ceux et celles issus des minorités visibles, qui ont du mal à se tailler une place dans le système d’éducation. Par ailleurs, le rapport souligne que les jeunes Autochtones continuent d’éprouver de la difficulté à accéder aux études supérieures. Les personnes issues de groupes vulnérables, comme les nouveaux arrivants, les réfugiés, les minorités visibles, les personnes handicapées et les jeunes issus de familles à faible revenu, sont souvent laissées pour compte parce qu’elles ne disposent pas des ressources nécessaires pour suivre des études jusqu’à l’obtention d’un diplôme.

Puisque ces obstacles financiers qui entravent l’accès aux études supérieures universitaires représentent un lourd fardeau, cela explique pourquoi certains étudiants retardent le moment de quitter le foyer familial, de se marier ou d’avoir des enfants. D’ailleurs, plus de quatre étudiants de niveau postsecondaire sur dix ayant obtenu leur diplôme en 2010 étaient endettés, d’après Statistique Canada.

En ce qui a trait au Programme d’aide au remboursement des prêts d’études canadiens, même si le seuil de remboursement des prêts a été relevé pour que l’emprunteur soit tenu de rembourser seulement lorsque son revenu atteint 25 000 $ par année, ce niveau de revenu est encore très proche du seuil de la pauvreté.

80 millions injectés

Les préoccupations des étudiants sur le coût élevé des études postsecondaires sont reprises dans l’étude du gouvernement sur la réduction de la pauvreté. L’étude, intitulée Briser le cycle : Une étude sur la réduction de la pauvreté, a été bien accueillie par L’Alliance canadienne des associations étudiantes (ACAE).

« Nous sommes heureux des investissements annoncés dans les budgets de 2016 et 2017 en vue de rendre les études postsecondaires plus abordables pour les étudiants, affirme la présidente du conseil d’administration de l’ACAE et présidente de l’association étudiante de l’Université Mount Royal, Shifrah Gadamsetti, par voie de communiqué. Cela étant dit, les études postsecondaires restent encore inaccessibles pour de trop nombreuses personnes en raison de leur coût élevé et bon nombre de récents diplômés peinent à se trouver un emploi bien rémunéré », affirme-t-elle.

« La bonne nouvelle est que ces 80 millions de dollars ont été injectés dans l’AFE par le gouvernement (NDLR : pour le rattrapage de l’indexation des frais de subsistance) et dès cet automne, chaque personne qui reçoit des bourses de l’AFE aura 500 $ de plus par année. Pour une mère monoparentale, par exemple, elle aura 1500 $. Ça fait une très grosse différence pour ces familles-là. C’est une bonne première étape, mais on voit que malgré ces sommes-là, il y a encore plein d’étudiants qui sont dans le besoin et ne sont pas admissibles », conclut M. Telles.