Il y a des années, les infirmières et infirmiers dénonçaient déjà le temps supplémentaire obligatoire et des conditions de travail qui leur occasionnaient stress et épuisement. ça c’était avant la pandémie. Puis, la COVID-19 est venue faire déborder un système de santé déjà saturé.

Si, au début de la crise sanitaire on a manifesté publiquement notre reconnaissance à celles et ceux qu’on appelait «nos anges gardiens», à coup de haies d’honneur, de shows de lumières et de déclarations lors de points de presse, ces démonstrations d’affection, bien que méritées, se sont estompées avec le temps. Non pas que l’on ne soutienne moins nos infirmières, mais celles-ci méritent pas mal plus qu’une tape dans le dos. On se garde désormais une petite gêne. Ce que les infirmières méritent, au-dessus de tout, c’est du respect, du temps pour souffler un peu et de meilleures conditions de travail.

Privées de vacances et de congés, forcées à soutenir une cadence quasi insoutenable, bon nombre d’entre elles sont tombées au combat, soit en raison de maladie ou d’accidents de travail. D’autres ont choisi de larguer le public pour aller vers les agences privées qui leur offrent des conditions sacrément plus alléchantes tant au niveau des salaires qu’en terme de leurs horaires. Plus de 4000 infirmières sur 61 000 l’ont fait depuis le début de la pandémie (selon La Presse du 8 février 2021). D’autres encore ont carrément quitté le navire, épuisées et à bout de souffle.

T’as beau avoir la vocation, mais à un moment donné, il y une limite

Notre journaliste Alexandra Guellil a rencontré plusieurs de ces professionnelles et professionnels en soins infirmiers qui en avaient long à dire sur leur réalité. Si l’on sent dans la majorité de ces témoignages l’amour qu’elles ont pour leur profession, leurs récits ont ceci en commun : manque de ressources, fatigue extrême, l’impression qu’on ne les écoute pas et ras-le-bol généralisé. Plusieurs expriment à quel point elles craignent les erreurs médicales en raison de l’épuisement. La situation est tendue et on se demande comment le système de santé s’en sortira.

Ça donne à réfléchir et c’est précisément le but de ce dossier

On comprendra aussi que la plupart des infirmières qui ont témoigné dans nos pages l’ont fait sous le couvert de l’anonymat, parce qu’elles craignent des sanctions de leurs employeurs. C’est pourquoi nous avons eu recours aux services d’une artiste pour illustrer le dossier. ça tombait bien puisque nous parlons, dans nos pages culturelles, du 10e Festival de la BD de Montréal. Parmi les participantes, Mélanie Leclerc, également en lice pour le prix Bédélys, nous a semblé un très bon choix pour illustrer la une et les pages de Soigner en temps de pandémie. Eh bien nous ne nous sommes pas trompés ! Chapeau bas à Mélanie qui a su donner un visage à ces gens et saisir avec beaucoup de sensibilité tant la beauté que la détresse de cette profession si essentielle. Quel talent !

 

Au moment d’aller sous presse, les lauréats des prestigieux prix Judith-Jasmin de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec ont été dévoilés. Quel bonheur et quelle fierté pour toute la grande famille de L’Itinéraire d’apprendre que notre journaliste Alexandra Guellil a remporté le premier prix dans la catégorie Arts, culture et arts de vivre pour son article Rhodnie Désir: Danser l’histoire, raconter les rythmes (1er février 2020). Cet honneur rejaillit sur toute l’équipe de L’Itinéraire et cette reconnaissance de nos pairs nous touche particulièrement.