Plus de 400 ménages vivent en logement social tout en gagnant plus de 80 000 $ par année, révèle le dernier rapport de la Vérificatrice générale du Québec. La présidente de la Société d’habitation du Québec (SHQ), Guylaine Marcoux, a refusé d’en discuter avec L’Itinéraire. Son directeur des communications tente d’expliquer.

1 La Vérificatrice se dit incapable de savoir si vous remplissez votre mandat parce que dans 45 % des dossiers, vous ne connaissez pas le prix du loyer et le revenu des occupants. Pourquoi n’exigez-vous pas ces informations des organismes que vous subventionnez ?

Au moment où le programme AccèsLogis a été créé, il y avait une volonté de rendre les organismes extrêmement autonomes. C’était le contexte d’autonomie de la fin des années 1990. La SHQ a quitté la partie HLM qui était contrôlée par l’État pour un style d’immeuble où les organismes à but non lucratif seraient autonomes dans leur gestion. Au niveau du prix des loyers abordables, les organismes peuvent demander le salaire des gens à l’entrée. Mais par la suite, on ne peut plus leur demander.

2 Bon nombre de locataires ont aujourd’hui des revenus supérieurs aux barèmes prévus par le programme. Sur un échantillon retenu de 7832 ménages, 2293 dépassent le seuil maximal. La Vérificatrice a même trouvé 144 ménages qui gagnent plus de 100 000 $. Vu la longueur des listes d’attente, pourquoi garde-t-on ces personnes dans des logements sociaux ?

Dans le cas du volet 1 du programme Accès-Logis pour monsieur et madame Tout-le-monde (les ménages, les gens seuls, les personnes aînées autonomes), on peut leur demander leur salaire à l’entrée, mais on ne peut plus le faire par la suite. Si leur salaire monte, ils ont une protection de leur logement prévu par le Code civil. Vous n’avez pas le droit d’expulser quelqu’un. Le droit au logement est protégé. Lorsque ces gens sont entrés dans leur logement, ils avaient un salaire qui correspondait à une certaine charte. Au fil des ans, il se peut que leur salaire ait augmenté, que des personnes seules soient devenues des couples ou que leur salaire ait explosé. En soi, ce n’est pas une mauvaise nouvelle. Il y a effectivement des gens qui aimeraient avoir ces places-là, mais le Code civil ne permet pas d’expulser quelqu’un. C’est différent avec les logements offerts aux gens qui sont à risque d’itinérance ou qui ont été itinérants. Ça c’est le volet 3, le programme de soutien au loyer (PSL). Ils payent 25 % de leur revenu. Dans les bâtisses vouées à ces clientèles-là, les gens reçoivent une aide de l’État. C’est plus facile à contrôler. On vérifie chaque année le salaire des gens.

3 Dans 53,3 % des cas, les organismes que vous subventionnez déclarent des loyers supérieurs aux normes du programme. Allez-vous faire respecter les normes provinciales ?

On parle ici des volets 2 et 3 du programme pour les clientèles qui ont plus de difficultés. Dans ce cadre-là, on essaye aussi d’offrir un milieu de vie. On offre ainsi un milieu de vie aux personnes âgées semi-autonomes, aux familles qui vivent la violence conjugale, aux personnes qui vivent l’itinérance. On ne doit pas seulement leur offrir un logement, mais également des espaces comme une salle à manger commune, une salle communautaire, une terrasse à l’extérieur. On essaye de leur offrir quelque chose qui sera bon pour eux. Ces aménagements supplémentaires ont un coût supplémentaire. Le coût supplémentaire est là.

4 Compte tenu des faits troublants relevés par la Vérificatrice, le public peut-il faire encore confiance à la SHQ ?

Je pense que la SHQ offre un bon service. Elle permet aux gens de sortir de la rue. Elle permet à des familles violentées d’avoir un milieu de vie plus normal. Oui ! La société peut avoir confiance dans la SHQ. Si la Vérificatrice nous blâme, on prend le blâme. Mais on le prend en se disant qu’on a posé des actes humanitaires en aidant les gens de la façon dont on pouvait. On ne peut pas tout faire. Si on a dépassé le coût des loyers, soit ! Mais on l’a dépassé pour des gens qui en avaient besoin. Et ça demeure notre mission. La société peut avoir confiance en nous, parce que notre bilan est là. On s’entend qu’il y a des choses à améliorer. La Vérificatrice nous en a fait part. On va suivre ses recommandations. On va lui offrir un plan d’action d’ici le 30 août prochain. On était déjà dans l’action pour la plupart des mesures dont elle nous a fait part. Mais il est évident que la société québécoise a besoin d’un organisme qui permet à des gens moins fortunés d’avoir un logement abordable.