Ils et elles sont plus de 24 millions au pays à vouloir redonner aux autres. Par leur présence et leur appui quotidien, les bénévoles sont une grande force dans notre société. Sans leur apport, de nombreux établissements et organismes communautaires – comme L’Itinéraire – ne pourraient tout simplement pas fonctionner.

À l’occasion de la Semaine de l’action bénévole 2022, dont le thème cette année est l’empathie, voici des témoignages et hommages à ces hommes et ces femmes qui consacrent leur énergie, leur temps et leurs savoirs aux autres au nom d’une cause.

Pour une vie d’enfant

La fillette devait avoir 7 ou 8 mois lorsque Annie Pelbois, bénévole dans la salle de réveil du bloc opératoire du CHU Sainte-Justine, l’a connue. Les médecins venaient de lui diagnostiquer un cancer de l’œil. Elle commençait la vie par de la chimiothérapie. Annie Pelbois a été chercher ses parents qui attendaient son réveil dans la salle d’attente.

Même si elle était porteuse d’une bonne nouvelle — le réveil de sa fillette — Annie Pelbois a vu cette mère s’effondrer en larmes dans le corridor de l’hôpital. Elle était au sol, complètement désemparée. Annie berçait le poupon dans ses bras. Le père tentait de soutenir sa femme, tout en cachant son désarroi. « Il fallait que je fasse quelque chose. J’ai déposé la fillette dans son lit et je me suis mise à la hauteur de la mère en lui disant simplement que sa fille avait besoin d’elle, qu’il fallait qu’elle se relève », se souvient cette ancienne gestionnaire en ressources humaines.

Annie Pelbois l’a aidée à se relever et a tenté de lui changer les idées en lui parlant de son pays natal, le Maroc. « Ça a pris du temps avant qu’elle ne réussisse à reprendre le dessus et c’est normal. Quand tu apprends que ton enfant de 7 mois a un cancer, c’est foudroyant. L’ infirmière s’occupait de la petite et moi des parents. Quand je les ai laissés dans leur chambre, ils étaient un peu plus calmes. »

En confiant ce souvenir, la bénévole croit que ces moments, bien qu’éprouvants, sont valorisants. « J’ai pu aider et consoler ces parents, et c’est ça qui compte. Aider les autres, ça remplit un humain. On se rend compte que nos petits problèmes quotidiens peuvent être moindres à côté de ceux qu’ ils peuvent avoir. Ça aide à relativiser », estime Annie Pelbois.

L’envie de vivre

Quand elle a commencé son bénévolat sept ans plus tôt, Maria Vaccaro, qui exerçait elle aussi une profession de gestionnaire, a opté pour le CHU Sainte-Justine parce qu’elle estimait que les enfants étaient l’avenir. « Je crois profondément que nous devrions tous avoir un bon départ dans la vie. Les enfants malades ont besoin d’accompagnement, de soutien, mais surtout de réconfort. Le moins que je puisse faire pour eux, c’est de donner du temps, de qualité je l’espère, pour les aider à surmonter un stress », explique-t-elle.

Le stress dont parle Maria Vaccaro, c’est celui que peuvent éprouver les enfants lorsqu’ils se réveillent d’une opération sans leurs parents à leurs côtés. La bénévole a œuvré dans plusieurs services de l’hôpital, de la néonatalogie à l’oncologie. Maria Vaccaro est touchée par les soins donnés aux enfants prématurés. « Voir des enfants branchés ainsi… Ils sont si petits. J’ai perdu un enfant à la naissance, ça vient me chercher. Et en même temps, quand j’ai la chance de bercer un poupon, je me sens privilégiée. Je crois beaucoup en laforcedelavie,ilyenaquilaporteeneux.Ilyenaquise battent de toutes leurs forces. »

La bénévole se souvient avoir offert un répit à une famille qui semblait nerveuse avec leur jeune bébé. Mais la mère a été agressive et a refusé l’offre. Maria Vaccaro a juste expliqué qu’elle restait sur l’étage au besoin, sans la juger ou sans s’offusquer de cette agressivité. « Cette mère est venue s’excuser par la suite et m’a confié qu’elle était ici parce qu’elle avait laissé un proche porter son enfant et qu’il l’avait échappé. J’ai compris son sentiment et pour la rassurer j’ai dit que j’allais m’assoir dans une chaise berçante pour éviter tout risque que l’enfant ne tombe à nouveau. C’est touchant, des fois on voit que des parents agissent de façon brusque, mais il y a toujours une raison et une explication, c’est pour cela qu’il faut faire attention avec le jugement. On ne connait pas l’histoire des personnes tant que cela. »

Comme à la brasserie

Le plus ancien de la gang des bénévoles attitrés à la salle de réveil, c’est Richard Millette, un ancien enseignant plus que jamais pédagogue dans son approche. Depuis qu’il est à la retraite, il ne chôme pas : en plus d’être impliqué à l’hôpital Sainte-Justine et avec les Grands Frères Grandes Soeurs, il donne aussi de son temps pour un club photo, en plus de faire de la peinture et de l’écriture.

D’un naturel joyeux, le bénévole compare les interactions avec le personnel médical et ses journées à celles que l’on vivrait dans une brasserie. « On te call pour te demander une chaleur [une couverture], un peu comme ça pourrait se faire dans une brasserie. J’aime dire que la salle de réveil, c’est comme la salle de transit à l’aéroport. Ce n’est pas comme à La Ronde ou dans un CPE, on s’entend qu’on reste dans un hôpital… Il y a des fois où c’est rough et où ça va vite », dit Richard Millette.

L’homme illustre son propos en parlant du code bleu qui alerte d’un arrêt cardiaque. Il peut arriver que le patient lors de son extubation vive une détresse respiratoire. Richard Millette évoque le bruit des appareils qui mesurent les constantes vitales et le mouvement dans les couloirs pour sauver un enfant.

Aussi impressionnantes que puissent être ces journées, il y a aussi des moments plus calmes où les bénévoles assistent simplement au réveil des enfants un peu déboussolés. « Certains ont peur au réveil et d’autres se demandent simplement ce qu’ ils font là. Notre rôle est juste de les rassurer. Et dans certains cas, surtout chez les jeunes autistes, on demande l’aide des parents pour les contenir et les aider à retrouver leurs repères. »