Si la mort est immuable, notre rapport à tout ce qui l’entoure change selon les époques et les coutumes. Parfois pour le meilleur et parfois pour le pire. C’est selon…

Petite, je me souviens d’avoir dormi dans la maison de mes grands-parents où la dépouille de mon grand-père était exposée durant les trois jours précédant ses funérailles. Ça m’avait fortement impressionnée, moi qui n’avais que 10 ans et n’avais jamais été en contact avec la mort.

C’est ainsi qu’on faisait à cette époque. L’atmosphère était feutrée, on se parlait en chuchotant, tout le monde de noir vêtu. Un peu à la manière des wakes irlandais, où l’on veillait le défunt avec famille et amis, moins les chansons et histoires racontées sur le disparu et le whiskey qui circulait abondamment. C’était plus festif du côté des Irlandais que chez les cousins québécois, dont la religion imposait une observance sobre et pieuse des rites funéraires.

C’est à cette même époque qu’on a cessé d’exposer les morts à domicile pour les envoyer dans des salons funéraires. Ainsi, on pouvait y accommoder plus de gens et soulager les familles de certaines responsabilités. Par exemple, lorsque quelqu’un trépassait, on le lavait et lui passait ses plus beaux habits. On le veillait à la chandelle jusqu’à ce qu’il ou elle soit placée dans un cercueil ouvert dans la maison avant de se rendre à l’église pour le service funéraire, puis au cimetière pour la mise en terre. Désormais ce sont les entreprises funéraires qui s’en occupent.

Mort expéditive ?

De nos jours, la tendance est plutôt à une formule tout-en-un : exposition pendant un ou deux jours d’une urne et un service funéraire sous un même toit. Les cercueils ouverts se font de plus en plus rares. Certains diront que le fait de ne pas voir le mort nous coupe du processus de deuil. D’autres diront que ce n’est pas comme ça que l’on souhaite se souvenir de la personne décédée. À chacun de faire comme bon lui semble.

Pour beaucoup, cette formule funéraire est, certes, plus expéditive, mais plus pratique dans un monde où tout va plus vite que jamais. Les gens travaillent, ils ont moins le temps. De plus, on expose de moins en moins nos enfants à cette réalité qu’est la mort. Un peu dommage à mon avis.

Il en revient à chacun de célébrer les funérailles d’un être cher et de préserver sa mémoire à sa façon. Par contre, lorsqu’il s’agit d’un proche, d’une personne aimée, il est important de voir et de vivre cette fin de vie pour en constater toute la grandeur et pour entamer le deuil.

Depuis mon enfance et au fil des années, j’en suis venue à fréquenter la mort plus souvent. J’ai vu des services patibulaires et sombres passer à des cérémonies remplies de musique et de couleurs. Suivent aussi des soirées où les rires côtoient les larmes et au cours desquelles on célèbre la mémoire de la personne qui nous a quittés. Des occasions de vraiment vivre la mort.

La mort sous toutes ses coutures

Dans cette édition, nous explorons notre rapport avec la mort, allant jusqu’à questionner les bienfaits de choisir l’heure et la date que passera la Grande Faucheuse.

Nous regardons aussi la façon dont d’autres peuples observent et célèbrent les rituels mortuaires. Avec le métissage de nos cultures au Québec, nos pratiques funéraires ont été influencées par des coutumes venues d’ailleurs et elles le seront sans doute encore.

Pour ce qui est des nouvelles façons de traiter les dépouilles, notre journaliste, dans un article fascinant, révèle des méthodes innovatrices qui permettent de respecter l’environnement.

Loin d’être triste et terne, ce dossier sur la mort apporte un éclairage sur ce passage inéluctable.
Comme le disait si bien Félix Leclerc : « C’est beau la mort, c’est plein de vie dedans ».