Afin d’écarter de notre chemin les mauvais augures, nous disons « je touche du bois », accompagnant notre geste de toucher du bout des doigts le morceau de bois le plus proche. Ce rituel des superstitieux ne permet pas d’éviter les coups du sort par magie mais permettrait de lutter contre sa peur de la malchance. Cette « protection » est donc, évidemment, psychologique. Ces rituels combattent la peur, pas la malchance elle-même.

« La superstition est l’art de se mettre en règle avec les coïncidences », croyait Jean Cocteau. Le Petit Robert, quant à lui, définit la superstition comme « le fait de croire que certains actes ou certains signes entraînent d’une manière occulte et automatique des conséquences bonnes ou mauvaises ».

Qui dit croyance, dit aussi religion. Dans une société démocratique il y aura toujours de la place pour faire certains compromis et ainsi éviter de revendiquer de façon excessive certaines pratiques religieuses à la limite de la tolérance. Selon les prévisions, d’ici 2031, près d’un Canadien sur trois pourrait appartenir à une minorité visible tandis que la proportion de Canadiens pratiquant une religion non chrétienne devait atteindre environ 14 %, selon les données de Statistique Canada.

L’ouverture d’esprit est donc, en matière de confession religieuse, primordiale afin de cohabiter en société, mais la limite de la liberté commence là où finit celle des autres. Réfléchissons à nos accommodements et à comment se forgent les croyances, les superstitions et les religions à notre époque.

Croyances ou superstitions ?

Les valeurs et croyances sont inculquées à l’enfant dès son jeune âge et l’on peut devenir prisonniers de certaines d’entre elles à l’âge adulte. Celles dont nous sommes à la fois les victimes et les instigateurs influencent notre capacité d’agir.

« Nous vivons dans une ère de mondialisation, surtout au niveau des cultures populaires. Les médias de masse sont au service de cette même culture mondialisée », affirme Raymond Lemieux, professeur retraité en sociologie religieuse à l’Université Laval. Selon lui, la plupart des croyances que les citoyens adoptent sont transmises par la télévision ou internet, notamment par l’entremise des réseaux sociaux.

Le professeur rappelle que « généralement, les croyances des autres auxquelles nous n’adhérons pas nous apparaissent comme des superstitions. C’est donc une question de point de vue ».

Parlant de superstitions, voici quelques chiffres étonnants : les Québécois croient aux sorcières (9 %), aux fantômes (21 %) à la réincarnation (33 %), aux extraterrestres (34 %), et aux anges (56 %), révèle un sondage publié en 2001.

Les liens entre les convictions religieuses et l’appartenance culturelle sont désormais complètement distendus. Ainsi la confession religieuse n’est plus significative à propos de l’appartenance culturelle. « Une identité qui reste dans certains cas purement symbolique, sans contenu pratique », soulève M. Lemieux.

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Des liens mis à l’épreuve

Frédéric Barriault Photo : Courtoisie

Généralement, le lien avec les croyances ou la spiritualité se ressent au moment d’une naissance, d’une souffrance ou de la mort. Bien que le catholicisme québécois dégringole en raison du manque de prêtres, de la baisse de la pratique religieuse et de fermetures d’églises, il est quand même rassembleur au niveau de la construction identitaire du peuple.

Si 44 % des Canadiens accordent une grande importance à la religion dans leur vie, la moitié d’entre eux n’assistent pas régulièrement à des services religieux, révèle une étude de Statistique Canada publiée en 2013.

« Les institutions comme le clergé ont occupé (au 19e siècle) beaucoup trop d’espace et étaient dans une position de force et de puissance démesurée allant vers un sentiment d’omnipuissance et même d’arrogance par moment », soutient Frédéric Barriault, rédacteur pour l’organisme catholique Communications et Société.

Comment intégrer le pluralisme religieux à la société ? Souvenons-nous du pape Jean-Paul II ; il a incarné une évolution du catholicisme notamment en jouant un rôle clé dans le dialogue interreligieux en « demandant pardon pour l’attitude violente des catholiques d’autrefois à l’égard des chrétiens orthodoxes, des protestants, des juifs, des musulmans, des Amérindiens ou des esclaves noirs ».

D’autre part, au Québec, l’adoption de la charte de la laïcité en 2013 a eu pour effet de nombreuses dérives xénophobes et islamophobes accompagnants le débat.

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Distinguer l’espace public et la sphère privée

Rachida Azdouz Photo : Courtoisie

« La liberté individuelle c’est comme le pouvoir : selon les mains entre lesquelles on le met, il peut être un formidable outil d’émancipation collective comme il peut devenir une arme de division et de tyrannie », soutient Rachida Azdouz, psychologue et spécialiste en relations interculturelles à l’Université de Montréal.

Dans une entrevue questions-réponses, l’experte s’est exprimée au sujet de notre société sécularisée où les individus religieux vivront plutôt leurs croyances dans la sphère privée, soit à la maison ou bien dans les lieux de culte. Ainsi la question de l’intégration se pose lorsqu’il n’y a plus de frontière entre l’espace public et le privé.

Au Québec et au Canada, nous avons les Chartes qui reconnaissent la liberté de conscience des individus et leur droit à l’égalité, notamment « la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association ».

Alors qu’en est-il de la fonction publique en rapport avec le port ou l’affichage de signes religieux, de même que l’Assemblée nationale avec la question du crucifix ?

« L’inclusion est un droit mais c’est aussi une responsabilité », prévient la spécialiste. C’est-à-dire que dans une société démocratique il y aura toujours de la place pour faire certains compromis et ainsi éviter de revendiquer de façon excessive certaines pratiques religieuses à la limite de la tolérance.

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