Agathe Melançon est camelot à L’Itinéraire depuis six ans et contribue régulièrement aux pages du magazine. Elle évolue dans le milieu de la poésie montréalaise depuis 1987. Elle a publié, à compte d’auteur, plusieurs recueils de poésie sous le pseudonyme La Poétesse Rêveuse. Ses poèmes ont également été publiés dans divers collectifs, dont celui du Steak Haché, dirigé par la bande de Denis Vanier et Josée Yvon. Récemment, elle a partagé son amour des mots en animant un atelier d’écriture destiné aux camelots, aux employé.e.s et aux participant.e.s des programmes d’insertion professionnelle de L’Itinéraire.
En entrant dans la salle, où le silence des participants témoignait d’un moment d’introspection, Alain, qui fréquente le Café M. Paul, voulait se faire discret. Raté. Il échappe son café sur la table, et déclenche des rires bienveillants qui décontractent l’atmosphère. Ses excuses, déclinées en plusieurs variations, se mêlent à l’amusement général. Ce petit incident a permis au groupe de se détendre et de briser la glace. Tous étaient réunis pour vivre un moment d’écriture, guidés par les conseils avisés d’Agathe, confortablement installée sur sa chaise devant le tableau, où une présentation préparée spécialement pour eux était projetée.
« Il ne faut pas se censurer, il faut se laisser aller. Parfois, on se met nous-mêmes des barrières. J’entends souvent : “Je ne peux pas écrire, je fais trop de fautes d’orthographe” ou “Mes phrases sont mal construites, soit trop longues, soit trop courtes.” C’est pas grave ! Structure ou pas, l’important, c’est de s’exprimer. Alors, on lâche prise », a articulé Agathe à l’heptade en guise d’introduction. Ce à quoi Alain a réagi, heureux que sa vision soit assez bonne ce jour-là pour lui permettre d’écrire quelques mots sur la page blanche devant lui.
Moment intime et de partage
« Pendant 15 minutes, vous allez broder un texte en le commençant par l’une de ces trois phrases : je ne sais pas quoi écrire ; je commence mon texte par quoi ? ; je me sens bloqué devant la page blanche », donne Agathe pour seule consigne. Le chrono lancé, chaque participant s’est mis à griffonner des mots, sans trop réfléchir. Après quelques rappels de temps de l’animatrice – « Il vous reste cinq minutes… deux minutes… dernière minute » –, les têtes se sont levées et des regards étonnés, parfois amusés, se sont échangés. « Vous pouvez partager votre texte avec le groupe… ou pas, a-t-elle indiqué. C’est vraiment à votre guise. » C’est justement Alain qui brise la glace. Sous l’attention silencieuse du reste du groupe, il commence à lire son texte, un peu stressé : « Je suis en extase devant le siècle qu’on vit. On est reparti dans notre folie de destruction, de dégradation et de sabotage de la boule bleue. Elle est unique dans notre système solaire. Réflexion. Réfléchir. À nous le futur, espérant un sauveur venu pour nous tous, qui sauve notre âme du mal. On est pogné dans nos corps physiques. On a 24 heures : huit pour travailler, huit pour dormir, huit pour s’amuser. Besoin de base : respiration. Amen. Je souhaite à l’humanité de s’aider. » Ce partage donnera le ton. Josée, Justine, Chantal, Anne-Marie et Marianne se succéderont ensuite pour lire, à leur tour, leurs écrits.
Une idée qui fait du chemin
L’idée d’offrir des ateliers collectifs d’écriture à L’Itinéraire est née grâce à Chantal Carrier, enseignante en insertion socioprofessionnelle du Centre de ressources éducatives et pédagogiques (CREP) et rattachée au Groupe L’Itinéraire depuis deux ans. À son invitation, Agathe est allée présenter son parcours d’auteure lors d’un cours donné par une collègue enseignante.
À la fin de sa présentation, elle a animé un atelier d’écriture avec les élèves présents. « J’ai tout de suite pensé qu’on devait reproduire cet atelier, étant donné son appréciation par la classe. Agathe a tellement d’idées dans la tête ! », lance Chantal, dont le bureau se trouve dans les locaux de L’Itinéraire. Après cette expérience inspirante, Agathe s’est dit qu’elle pourrait préparer et offrir un atelier à « sa gang » du magazine, avec son soutien.
La suite
Camelot et poétesse, Agathe poursuivra l’animation d’ateliers d’écriture dans les mois à venir. Elle espère une mobilisation et une participation encore plus grandes, sachant que la première séance a été, selon les retours des participants, un succès. L’Itinéraire prévoit d’ailleurs de publier certains des textes rédigés lors de ces moments d’écriture collective dans ses prochaines éditions estivales.
Vous venez de lire un article de l’édition du 15 juillet 2025.