La campagne électorale bat son plein. Le 1er octobre, les Québécois seront appelés aux urnes pour élire le prochain gouvernement. Beaucoup de promesses ont été faites par les partis, beaucoup d’enjeux ont été soulevés. Mais, comme à chaque campagne, rien n’a été dit ni promis sur la lutte à l’itinérance et la pauvreté.
L’itinérance n’est peut-être pas un sujet populaire comme la santé, l’éducation, ou l’économie, mais c’est un enjeu majeur de société. Des pistes claires doivent être proposées tant pour la prévenir que pour lutter contre.
On sensibilise de plus en plus à l’itinérance en dehors des grandes villes et ce n’est pas un hasard. C’est vrai : de plus en plus de personnes vivent dans la rue, partout au Québec !
L’Itinéraire vous invite à parler d’itinérance durant cette campagne électorale en soulevant quelques enjeux électoraux.
La fameuse loi 25
La loi 25 et son Programme Objectif Emploi (POE), en vigueur depuis le 1er avril 2018, a un impact direct sur l’itinérance. Certains affirment même qu’il s’agit d’une « fabrique à itinérants ». Les demandeurs de l’aide sociale doivent s’inscrire à un parcours obligé vers le marché du travail. S’ils quittent le programme, ils risquent de voir passer leur prestation mensuelle de 624 $ à 404 $. Difficile de garder un logement et de manger avec un tel montant !
À L’Itinéraire, nous constatons au quotidien les nombreuses barrières que doivent franchir nos camelots prestataires de l’aide sociale. D’où la nécessité d’une approche personnalisée et adaptée à leur réalité en renforçant les démarches positives plutôt qu’en misant sur l’aspect punitif. Car sortir du cycle de l’itinérance dépend bien plus que d’un simple processus de recherche d’emploi. Il faut avant tout reconstruire un réseau social et surtout, une estime de soi.
Miser sur l’expertise des organismes
À L’Itinéraire, cette approche fait ses preuves depuis près de 30 ans. L’une de nos camelots nous a d’ailleurs annoncé qu’elle quittait l’organisme pour s’inscrire à un cours d’agente de sécurité. Elle souhaitait le faire il y a deux ans, à son arrivée à L’Itinéraire, mais elle n’avait pas assez confiance en elle. C’est la création de liens positifs avec ses pairs et ses clients en plus de la rédaction de reportages dans le magazine qui lui ont donné l’estime nécessaire pour entreprendre sa démarche.
Le gouvernement provincial devrait ainsi miser sur l’expertise des organismes pour établir ses programmes. L’Itinéraire en est un, mais il en existe une multitude d’autres.
D’ailleurs, saviez-vous que même un prestataire de l’aide sociale qui travaille, comme camelot par exemple, n’a le droit d’amasser que 200 $ de revenu supplémentaire ?
Et si l’expertise d’organismes comme L’Itinéraire était reconnue, serait-il envisageable de rehausser ce montant maximum pour les personnes accompagnées à travers de tels programmes de réinsertion sociale ?
Détruire les préjugés
Ce n’est pas par choix qu’une personne reçoit 624 $ par mois. C’est en dernier recours. Il existe d’ailleurs une forte corrélation entre itinérance et aide sociale.
Pourtant, il persiste encore une tonne de préjugés à leur égard. Paresseux, dites-vous ? Nos camelots travaillent souvent à temps plein, même sept jours par semaine. Et c’est sans compter les nombreux articles qu’ils rédigent. Ils restent pourtant confrontés au mépris des gens.
Depuis l’instauration de l’aide sociale, il y a 30 ans, les programmes du gouvernement n’apportent rien de plus, en laissant même croire qu’il est digne de vivre avec 624 $ par mois. Un montant qui ne couvre pas la moitié des besoins de base.*
Ce montant doit être rehaussé, et le gouvernement doit briser ces préjugés par l’éducation et une vraie campagne de sensibilisation à l’échelle du Québec.
Enfin, les quatre dernières années ont été marquées par des coupures de financement et de services dans le milieu communautaire, alors que les coffres de l’État ont été remplis. Seulement 2 % du budget de L’Itinéraire (32 000 $) provient du Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC). Le financement doit être rétabli et même bonifié. À l’image de la nouvelle Politique de reconnaissance des organismes communautaires de Montréal, leur expertise doit être reconnue au niveau provincial également.
* Selon la mesure du panier de consommation (MPC)