Annie/Yannick, accompagné(e) par Camille Teste

Annie, camelot à la Bibliothèque Jacques-Ferron à Longueuil change de sexe. Désormais, vous allez pouvoir l’appeler Yannick. D’ici quelques semaines, elle/il verra son corps transformé, et avec cette transformation viendra sans doute, de la part de ses proches et de ses clients, de nombreuses questions. C’est normal : la réassignation de sexe, ce n’est pas quelque chose que nous connaissons bien. Alors, que faut-il savoir ? Nous avons interrogé Annie/Yannick.

Qu’est-ce qui t’as poussé à sauter le pas ? Y a-t-il eu un élément déclencheur ?

La question qui revient le plus souvent c’est : « pourquoi à 45 ans ? » Honnêtement, personne n’est tombé en bas de sa chaise quand j’ai annoncé que j’entreprenais une transition de réassignation de sexe. Cependant, ils étaient surtout surpris que j’aie attendu aussi longtemps.

Dans les faits, au printemps dernier, je suis allé en thérapie à cause d’une dépression qui s’aggravait. C’était un peu ça l’élément déclencheur. Là-bas, j’ai pris conscience que j’avais éliminé les « autres raisons » qui me faisaient ressentir ce mal de vivre et qu’il restait, en fait, juste cette question-là.

Faut-il parler de transformation ou transition ?

Dans les premiers mois, j’ai utilisé le terme « transformation ». À quelques reprises, dans la communauté trans, on m’a invité à utiliser le terme « transition ». Je précise qu’ici je ne donne pas le point de vue de la communauté trans, mais le mien. Je crois que lorsqu’on parle de « transfo », c’est qu’on se concentre sur l’aspect physique. À l’inverse, lorsqu’on parle de « transition », on englobe l’ensemble des étapes et des sphères qu’un processus de réassignation de genre comporte.

Pour moi, dans les prochaines années, c’est un peu comme si j’allais vivre une seconde période d’adolescence qui va me permettre de corriger la situation. Car dans les faits, l’adolescence est une période de « transition », un intervalle de temps ou la principale « transformation » observée est l’apparition des caractères sexuels secondaires. C’est comme ça que je vois ma situation : c’est une période de « transition » qui va comporter plusieurs moments de « transformation ». Mais tout comme pour l’adolescence, ça ne peut pas être réduit qu’aux changements physiques, c’est plus complexe : je vais consolider mon identité, redéfinir mes rôles sociaux, etc.

Pour le moment, je me rends compte que je parle de « transfo » quand je cède à mon impatience vis-à-vis des changements que va vivre mon corps .et de « transition » quand je vis quelque chose de plus global.

Est-ce que tu vas changer de prénom ?

Oui, et comme c’est ma sœur qui avait choisi mon nom féminin à la naissance, c’est à elle que j’ai donné la tâche de choisir mon nom de gars. Elle a arrêté sa décision sur Yannick.