Je suis né en Gaspésie d’un père pêcheur de morue et d’une mère très catholique. On était pauvres. J’étais très turbulent et batailleur. Aujourd’hui je dirais à l’enfant que j’étais :

Quand il faisait des mauvais coups : « Tu capotes ? Écris comment tu te sens ». J’essayerais de le faire réfléchir sur le pourquoi il a posé un acte négatif. La punition ça sert à rien, ça endurcit la personne et après ça fait plus rien. Quand on est enfant on sait pas ce qu’est le bien et le mal. Il faisait des mauvais coups pour montrer sa valeur par rapport à ses chums et faire monter l’adrénaline.

Quand il volait, je lui aurais dit: « Pourquoi t’as fait ça? Si t’avais besoin de quelque chose, t’avais qu’à me le dire ».

Je dirais à l’ado que j’étais quand il faisait des mauvais coups : «Je veux que tu partes de chez moi pour ne pas devenir comme moi». Mon père n’était pas un exemple pour moi, il n’était pas malin, mais il était tout le temps saoul.

Je dirais à mon jeune moi d’aller dans l’armée, comme je l’ai fait, pour la discipline, pour casser ma tête dure, pour garder la persévérance, comme je l’ai encore sur mon point de vente et ailleurs dans ma vie.

Je lui parlerais de comment j’ai connu des jeunes en faisant une pièce de théâtre dans une école secondaire. En leur expliquant que la vie n’est pas facile, mais que si tu fais le bien, ça va te revenir en dix fois mieux. Ça je l’ai appris avec l’âge. Je crois à la loi du retour. Je leur ai conté ma vie à Montréal, quand je quêtais et comment je m’en suis sorti en vendant L’Itinéraire. Les jeunes étaient tout surpris et attentifs, avec des regards éblouis, épatés. Ils m’ont posé des questions.

Je lui parlerais aussi du vol de mon sac à dos qui s’est produit récemment. Si j’avais eu le caractère d’avant, j’aurais voulu casser la gueule à tout le monde et j’aurais volé moi-même un autre sac à dos. Vu que je l’ai pris calmement, il y a un bon samaritain (employé de La Cordée) qui m’a acheté un sac. Un autre bon samaritain qui travaille chez Metro m’a donné un fil pour booster mon téléphone et un autre, un bloc rechargeable. J’ai été épaté que le monde me prenne pour une bonne personne et pas seulement comme un vendeur.

Je ne referais pas les mêmes gaffes. En vieillissant quelqu’un s’est réveillé en dedans de moi. Je m’aime en conscience, bien plus qu’avant, je réfléchis. J’aime ma façon de penser. Avoir la santé, je foncerais. Je pense au dicton: « Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait ».

Je dirais à l’adulte qui commence sa vie: « Fais attention, la vie est sournoise: il va y avoir des mauvais moments, mais tout s’arrange malgré les difficultés. Ne focusse pas sur les problèmes et laisse-toi aller sur la vague positivement ».

Avec la collaboration de Marie Brion, bénévole à la rédaction.