La crise de la COVID-19, on peut la regarder de deux manières : comme un coup de massue qui dérange notre fonctionnement ou comme une opportunité d’apprendre.

Le mal est fait. La crise écologique est amorcée, et comme le souligne David King-Ruel, professeur de développement durable à l’Université de Sherbrooke : « On n’a pas vu le début de ce qui s’en vient au niveau environnemental. » Mais la COVID prouve que nous sommes capables de nous adapter rapidement et efficacement à un changement. Une opportunité à saisir vers une société inspirée de la nature ?

Quelques jours avant de rédiger cet article, Yves Grégoire, un camelot de L’Itinéraire, me tenait ce propos : « La nature est forte, mais on la maganne! Le monde a tendance à se croire supérieur à toutes les autres espèces. On est peut-être au sommet, mais on oublie qu’on a besoin des uns des autres. Et le système économique run tout, en plus de nous engourdir dans notre petit confort. » Voilà qui résume fort bien quelques maux de nos sociétés lorsqu’on parle de rêver une société plus écologique.

Du biomimétisme à l’économie bleue

C’est là qu’entre en scène le biomimétisme : l’art d’imiter la nature tant dans ses formes que dans son fonctionnement. Certains s’en servent pour améliorer l’efficacité d’objets quotidiens (trains, immeubles, avions, etc.) d’autres pour repenser la société. C’est le cas de Gunter Pauli, créateur de la fondation ZERI (Recherche et Initiatives pour Zéro Pollution), surnommée le gourou du développement durable par le magazine d’actualités français Le Point, qui a imaginé l’économie bleue.

En 1990, alors qu’il reprenait les rênes d’Encover (entreprise finlandaise de produits ménagers sans phosphate, mondialement connue), il décide d’y établir un modèle plus écologique. Il se rend rapidement compte que si ses produits sont «verts», ils n’en sont pas pour autant durables puisque l’huile de palme, grande gagnante de la déforestation indonésienne, est nécessaire à leur fabrication. Il revendra donc l’entreprise et se demandera comment participer à la régénération de la forêt plutôt qu’à sa destruction massive.

C’est le début de l’économie bleue. Une théorie qui s’inspire de la nature comme mentor et qui cherche à faire du bien plutôt qu’un moindre mal. En 2012, il l’expliquera en entrevue au Devoir. « C’est un modèle qui suit la sagesse des écosystèmes. Ils fournissent énergie et aliments, recyclent les déchets, répondent aux besoins de tous et se régénèrent sans cesse. La nature excelle en termes de créativité, d’adaptabilité et d’abondance. C’est donc une économie non polluante, créatrice d’emplois, de cohésion sociale et même de valeur. Je l’oppose à « l’économie rouge » actuelle, caractérisée par l’endettement, le gaspillage, les confortables comptes en banque d’une minorité et l’explosion du chômage. L’économie bleue va aussi au-delà de la « verte » : chère et subventionnée, elle n’a pas de sens non plus. »