Par Geneviève Bertrand

Sans le savoir, quand vous faites des recherches sur le web, vous posez un acte socialement engagé. Lutter contre les changements climatiques en un seul clic ? Oui, c’est possible. C’est du moins l’initiative d’un moteur de recherche allemand qui tente de transformer la façon dont on navigue sur internet.

Christian Kroll, originaire de Berlin, a fondé Ecosia en 2009. Après des études universitaires en gestion d’entreprise, il est déçu de constater que faire des profits constitue pour la plupart des gens le seul objectif valable d’une entreprise. Christian décide alors de consacrer son énergie à quelque chose de plus significatif et il prend vite conscience du rôle essentiel que jouent les arbres dans la survie de notre planète, d’où est née cette entreprise écoresponsable qui fait concurrence au géant Google.

Peu connue, Ecosia gravit tranquillement les marches de la notoriété avec pour but la réduction de notre empreinte écologique. Mission honorable, s’il en est une, elle veut contribuer au reboisement en Afrique et en Amérique du Sud notamment, tout en neutralisant des émissions de gaz carbonique associées à la recherche de mots-clés sur la toile. Jusqu’à présent, ce sont 10,6 millions d’arbres qui ont été plantés à travers le monde grâce aux clics de ses internautes.

Concurrencer Google pour planter des arbres ?

La société allemande, organisme à but non-lucratif, verse 80 % des profits issus de ses revenus publicitaires en lien avec les recherches par mots-clés à des programmes de plantation d’arbres au Burkina Faso, à Madagascar et au Pérou. Si le chiffre d’affaires d’Ecosia en mai dernier s’est élevé à 749 071 euros, l’entreprise web a investi 441 197 euros dans la plantation d’arbres, ce qui équivaut à 59 % de ses revenus ou 80 % de ses excédents, selon son rapport financier.

En faisant des recherches et des achats en ligne avec Ecosia, l’internaute contribue à la protection de l’environnement, puisqu’un arbre est planté en moyenne à toutes les sept secondes. Cependant, ces annonces publicitaires pourraient perturber la navigation de l’internaute. C’est un compromis : un choix à connotation morale.

Pourquoi avoir fait du reboisement votre cheval de bataille?

« Parce que les arbres sont vraiment géniaux. Au fur et à mesure qu’un arbre grandit, il absorbe beaucoup de CO2, ce qui constitue l’un des moyens les plus efficaces de contrer le changement climatique. Mais les arbres font tellement plus que cela. Ils améliorent les conditions du sol et restaurent le bassin hydrographique. Ils créent des microclimats qui améliorent l’agriculture locale. Ils procurent des produits forestiers que les communautés locales peuvent consommer et vendre. Ils font tant de bonnes choses qui se produisent autour d’eux », déclare Christian Kroll sur le site web de l’entreprise.

Qu’est-ce qui distingue Ecosia de ses concurrents ?

« Nous valorisons toute démarche visant à mêler technologie et mieux-être commun. Si d’autres fournisseurs de moteurs de recherche permettent à leurs utilisateurs de faire le bien autour d’eux grâce à leurs recherches en ligne, alors nous nous félicitons à chaque fois de voir qu’une entreprise supplémentaire a rejoint le mouvement. Il existe quelques fournisseurs de moteurs de recherche qui permettent à leurs utilisateurs de choisir la cause qu’ils souhaitent soutenir avec leurs recherches. Si ceux-ci permettent parfois de soutenir financièrement plus de 100 000 organisations répertoriées, leur impact est malheureusement souvent très limité. C’est la raison pour laquelle Ecosia a décidé de ne soutenir qu’une seule cause à la fois. Cela nous permet d’assurer la plus grande transparence, dans la mesure où nous pouvons étudier soigneusement les partenaires et les projets que nous souhaitons soutenir, mais surtout : notre impact parle de lui-même. Le fait de soutenir financièrement des programmes de plantation d’arbres à hauteur de 100 000 euros par mois permet vraiment de bouger les lignes » peut-on lire sur le site d’Ecosia.

Vers un milliard d’arbres?

L’objectif principal d’Ecosia est de planter un milliard d’arbres. « C’est très ambitieux, mais je pense que nous pouvons le réaliser avec l’aide de nos utilisateurs. Plus les gens connaissent Ecosia et commencent à l’utiliser, plus vite nous allons atteindre notre objectif. Ensemble, nous pourrions avoir un impact vraiment significatif », lance Christian Kroll.

La société recherche des projets qui ont le plus grand impact positif pour chaque euro dépensé. « Alors que notre projet au Burkina Faso arrête la désertification et offre aux populations locales de nouvelles opportunités économiques, notre projet indonésien permet aux communautés locales de lutter contre les monocultures de l’huile de palme », précise le président d’Écosia.

Pourquoi ne travaillez-vous pas avec Google?

« Au début, nous avions discuté d’une collaboration officielle avec Google, mais ils se sont retirés du partenariat deux jours avant notre lancement. Selon Google, les gens qui utilisent un moteur de recherche de charité ont tendance à faire des clics aléatoires sur plus d’annonces publicitaires qu’en temps normal », soutient Christian Kroll.

La maxime d’Ecosia s’inspire par ailleurs d’un proverbe africain : « si vous pensez que vous êtes trop petits pour faire une différence, vous n’avez jamais passé une nuit avec un moustique ». Voilà ce qu’aime son fondateur : « Il faut seulement faire un petit changement dans vos habitudes pour rejoindre une communauté qui fait une grande différence ».