À l’occasion du deuxième portrait de l’itinérance à Montréal, un dénombrement, qui aura lieu dans les refuges et à l’extérieur, est prévu pour le 24 avril 2018. Cet exercice, qui mobilisera jusqu’à 800 bénévoles, permettra de dénombrer les personnes en situation d’itinérance visible, en plus de recueillir des renseignements auprès d’elles.

Le premier dénombrement montréalais avait comptabilisé 3016 personnes en situation d’itinérance visible dans la nuit du 24 mars 2015. Le dénombrement 2018 s’inscrit dans le 2e portrait sur l’itinérance au Québec dont l’objectif est de suivre l’évolution de l’itinérance dans le temps, tout en comparant ces nouvelles données avec celles d’il y a trois ans.

Le but avoué est d’obtenir des données sur la population en situation d’itinérance à Montréal utiles à orienter la prise de décisions. Et aussi, « un soutien qui va de la prévention à l’aide d’urgence, en passant par le logement et les services d’insertion sociale et socioprofessionnelle », soutient Linda Boutin, relationniste à la Ville de Montréal.

Priorités

Eric Latimer, chercheur au Centre de recherche de l’hôpital Douglas et de l’Université McGill, et responsable du dénombrement, évoque trois priorités pour 2018 : « (1) augmenter le nombre de questionnaires remplis par les femmes, les jeunes (moins de 30 ans) et les Autochtones, y compris en situation d’itinérance cachée; (2) mieux couvrir le territoire, avec plus de bénévoles; (3) recueillir plus de questionnaires par secteur et obtenir des réponses plus complètes. Déjà, les données de 2015 ont mené à de nouvelles actions de la Ville de Montréal qui a presque doublé son financement des centres de jour pour mieux desservir plus de 400 personnes qui dorment dans la rue. »

Le dénombrement 2018 se déroulera dans un contexte où 61 communautés au Canada sont invitées à dénombrer l’itinérance sur leur territoire. Au Québec, en plus de Montréal, 10 autres communautés feront un dénombrement ponctuel, sous la direction du ministère de la Santé et des Services sociaux. Les nouvelles données sociodémographiques recueillies s’ajouteront aux connaissances sur l’itinérance et permettront de mieux comprendre le phénomène.

Ce deuxième recensement est un outil complémentaire qui permettra d’obtenir une compréhension de l’itinérance à partir de données variées et comparables.

Évaluation des besoins

Étant « une préoccupation importante pour la Ville, le phénomène de l’itinérance est complexe et en constante évolution, estime Mme Boutin. Si elle n’empêche pas les intervenants de première ligne d’œuvrer sur le terrain, l’absence de données fiables rend difficile l’évaluation précise des besoins et la planification de stratégies efficaces pour juger la problématique. Les données issues de cet exercice sont utiles pour connaître la sévérité de la situation des personnes dans l’espace public et dans les ressources. Notamment, les données de l’itinérance visible aident à mieux planifier les mesures d’urgence pour les sans-abri, particulièrement dans l’espace public et les ressources d’hébergement d’urgence (refuges) ».

À titre d’exemple, en 2015, les données indiquaient que près de 76 % des répondants qui dormaient à l’extérieur avaient fréquenté un centre de jour au cours des six derniers mois. « Cette information importante a conduit la Ville à s’intéresser davantage au travail des centres de jour montréalais et à accentuer ses efforts à soutenir ce type de ressource », souligne Mme Boutin.

Comment orienter la prise de décisions ?

Le portrait de l’itinérance a beaucoup changé au fil des ans. « Le phénomène ne touche plus uniquement les hommes, mais aussi les femmes, les jeunes et les personnes âgées. Aussi, l’occupation dans les refuges, l’état de santé des personnes, la situation des populations qui vivent des réalités spécifiques comme les personnes autochtones et les personnes trans nous intéressent particulièrement. Le phénomène ne touche pas uniquement le centre-ville, et c’est pourquoi il est clair pour nous que le dénombrement devra s’intéresser aux quartiers périphériques et non seulement aux quartiers centraux », conclut Mme Boutin.

Quelle est la différence entre itinérance visible et cachée ?

  • L’itinérance visible réfère aux personnes en situation d’itinérance qui vivent dans la rue, dans les refuges, dans les logements de transition, ou dans divers autres types de lieux identifiables (centres de crise, centres de thérapie, centres de détention, hôpitaux, etc.) sans avoir de domicile fixe.
  • L’itinérance cachée concerne les personnes qui se trouvent dans des maisons de chambres, hébergées chez d’autres, dans des hôtels ou des motels, et qui n’ont pas de domicile fixe. Il s’agit d’une forme d’itinérance plus difficile à dénombrer et à documenter.

 

Photo : Mario Alberto Reyes Zamora