Josée Panet-Raymond
Rédactrice en chef

Nous soulignons souvent que L’Itinéraire occupe une place spéciale – et importante – dans le paysage médiatique québécois. Nul autre magazine ne peut se vanter d’offrir un point de vue comme le nôtre sur les grands enjeux sociaux. Ce point de vue, c’est celui de la rue, celui vécu sur le terrain, branché directement à la communauté.

Ce point de vue unique comporte un certain poids et ajoute à la couleur de ce paysage médiatique. Que L’Itinéraire fasse partie d’un organisme communautaire qui soutient et autonomise les plus démunis et marginalisés de la société, ne fait que renforcer le fait que nous sommes la voix des sans-voix.

Qui plus est, que nous soyons un OSBL (organisme sans but lucratif) n’enlève rien à la qualité et à la rigueur de nos reportages. Au contraire! Ce statut nous procure une indépendance certaine puisque nous n’avons pas de comptes à rendre à des actionnaires ou des propriétaires qui nous imposeraient une ligne éditoriale.

Tous dans le même bateau

Ces derniers temps, on a suivi avec intérêt ce qui se passe pour nos collègues de La Presse. Avec le retrait de Power Corporation, le quotidien de la rue Saint-Jacques a opté pour le modèle OSBL afin d’assurer la poursuite de ses activités – et sa survie. Ce nouveau statut n’enlèvera rien à la qualité de ses reportages … n’en déplaise à ses détracteurs.

Par contre, ce que nous vivons à L’Itinéraire, et ce que vivra La Presse une fois que les 50 millions $ injectés par les Desmarais dans la nouvelle fiducie seront épuisés, c’est que le fait de compter sur l’apport philanthropique pour mener une entreprise est tout un défi ! Demandez-le au Devoir, qui, sans le soutien renouvelé de mécènes généreux ne serait plus là. Désormais, nous partageons tous une même réalité, bien qu’à des degrés différents.

Je disais que peu importe son statut, L’Itinéraire a pour mission d’appuyer ses camelots et participants. Notre but, notamment dans la salle de rédaction est de faire éclore des talents et de les faire progresser par le biais d’accompagnements individuels, de formations en journalisme, de stages (entre autres à La Presse).

Événement historique pour L’Itinéraire

Une des résultantes de notre mission a été ce qu’on peut qualifier d’événement historique à L’Itinéraire : une entrevue exclusive par nos camelots avec le premier ministre du Canada, Justin Trudeau. L’article qui en découle en page 13, révèle tout le travail accompli avec ces camelots, de l’entrevue à la rédaction. Que de chemin parcouru ! Quand on sait que Mostapha, Isabelle et Jean-Claude ne participent dans le magazine que depuis deux à trois ans. Et quelle fierté pour toute l’équipe de L’Itinéraire !

Je vous résume un peu le déroulement de cette journée historique. Le 31 mai dernier, nous étions assis dans l’antichambre du bureau du premier ministre, parmi une dizaine d’autres parlementaires vêtus de tailleurs ou vestons-cravates, cellulaire à l’oreille, l’œil rivé sur leur ordinateur, attendant de rencontrer Justin Trudeau pour régler des affaires d’État.

J’étais impressionnée par le calme de nos camelots Mostapha, Isabelle, Jean-Claude et de notre photographe-participant, Mario.

Debout depuis quatre heures du matin pour prendre le premier train vers Ottawa, nos quatre participants étaient bien préparés, ayant au préalable formulé des questions et approfondi les thèmes qu’ils allaient aborder avec le PM.

Derrière la porte, Justin Trudeau, lui, était aux prises avec une « guerre » commerciale déclarée par le président Trump ainsi qu’avec la préparation d’un G7 qui s’annonçait turbulent. Jusqu’à ce moment, nous nous étions demandé si l’entrevue allait avoir lieu, vue la conjoncture politique alambiquée.

Au bout de quelques minutes d’attente, la porte s’est ouverte sur un homme posé et affable, qui a pris la peine d’accueillir chaleureusement chacun des membres de la délégation de L’Itinéraire. Justin Trudeau a tout de suite mis les camelots à l’aise et a accordé à chacun d’eux le respect et la crédibilité qui leur revenait. Ici, aucune complaisance. Les camelots ont fait un travail de journalisme selon les règles de l’art et le premier ministre a répondu à des questions parfois difficiles.

Vous dire la fierté qu’ils ont éprouvée ! Cette expérience demeurera l’une des plus marquantes dans l’histoire du Groupe. Elle est l’aboutissement de notre mission et prouve que le travail et la bonne volonté de gens qui veulent s’en sortir donnent parfois des résultats étonnants.